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« Aïe, aïe, aïe… elles font mal, ces questions », a réagi Susie Morgenstern en découvrant la liste des interrogations rituelles de la rubrique Vie de parents. Américaine arrivée en France en 1967 après avoir rencontré le mathématicien Jacques Morgenstern (1937-1994), elle y devient mère « avec la certitude d’être née pour cette mission-suicide », selon la formule employée dans son autobiographie Mes 18 exils (L’Iconoclaste, 2021, sorti en poche en 2023). Avec l’aînée, Aliyah, elle a coécrit Terminale ! Tout le monde descend (L’Ecole des loisirs, 1985), un livre dans lequel mère et fille comparent leurs versions des mêmes événements. Quant à la seconde, Mayah, les récits de ses journées d’école ont nourri La Sixième (L’Ecole des loisirs, 1984), livre vedette des bibliothèques d’école, publié il y a quarante ans. « La maternité n’est pas une science exacte. Elle est faite de gaffes, de paroles lâchées sans réfléchir, d’ambitions démesurées, de lacunes psychologiques, de paresse aussi. Les reproches sont souvent justifiés », écrit-elle encore dans son récit autobiographique.
Ses filles ont respectivement 57 et 53 ans aujourd’hui. Quelque 150 livres ont été publiés depuis, dont le dernier, La Rentrée sans tête (Les Arènes, 44 pages, 14,90 euros). Paradoxalement, alors que l’école française a été son cauchemar, c’est en son sein qu’elle a situé l’action de la plupart de ses livres. A 79 ans, Susie Morgenstern travaille encore sur une dizaine de projets, elle est devenue grand-mère, arrière-grand-mère même, a inventé le verbe « grandmerder », qui désigne le fait de s’occuper de ses petits-enfants à des moments pas forcément choisis, et a des projets d’écriture avec eux.
Dès le CP. J’étais toujours la plus grande de la classe, et j’ai assumé le rôle de mère. Tout ce que j’ai toujours voulu être ! Pas top model, pas vedette de cinéma, pas chanteuse pop, juste maman. Je ne suis plus la plus grande, mais maintenant je suis la plus âgée partout où je vais, plutôt la grand-mère de tout le monde.
Curieusement, quand je suis devenue mère pour de vrai, à 22 ans, cela ne me semblait pas normal. Je n’avais pas la maturité requise. La maternité a été à la fois la plus grande aventure de ma vie et le plus grand échec. Mais je viens de devenir arrière-grand-mère, le couronnement glorieux de ma vie ! J’étais une mère tout à fait imparfaite, mais je me suis beaucoup améliorée en grand-mère.
Oui ! Je pourrais être pleureuse professionnelle. On devrait m’engager pour des enterrements. Dommage que je ne puisse pas être présente au mien ! Quand je me suis mise à pleurer pendant le générique d’Hannah et ses sœurs [film de Woody Allen de 1986] – le générique ! –, une de mes filles m’a dit : « Maman ! Le film n’a même pas commencé ! » Je n’ai jamais exclu mes enfants du spectacle de mes sanglots. Elles m’ont vue pleurer dans mes disputes avec mon mari.
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